Les auxiliaires du jardin

Conférence de Denis PEPIN le 20 octobre à LANNION à l’initiative d' »eaux et rivières ».

Les auxiliaires sont très nombreux au jardin ; ils concourent à la destruction des ravageurs des plantes cultivées mais ne peuvent en aucun cas soigner les plantes malades…

Ils sont de trois types :

  • les micro-organismes : virus, bactéries, champignons
  • les invertébrés : arthropodes (insectes, araignées, crustacés…), nématodes
  • les vertébrés : oiseaux, batraciens, reptiles, petits mammifères insectivores

Les auxiliaires sont une solution pour combattre les ravageurs du jardin mais pas LA solution miracle. Ils sont très bons pour combattre les pucerons, acariens et cochenilles. Ils ont quelques difficultés face aux limaces, escargots, noctuelles, piérides. Ils ne sont pas très efficaces face à la teigne du poireau, la mouche mineuse, les altises, la mouche de la carotte.

Lutte contre les pucerons :

Denis Pépin nous a passé un petit film intitulé « Guerre et paix au potager » pour nous montrer l’activité conjointe de plusieurs auxiliaires en lutte contre une très importante colonie de pucerons qui avait envahi un pied d’artichaut, pied d’artichaut spécialement introduit dans un potager exempt de pucerons à ce moment-là, juste pour nous montrer un autre aspect du problème.

Très rapidement, six coccinelles sont arrivées sur ce pied d’artichaut et ont boulotté sans complexe les pucerons ; elles ont été très vite aidées par des syrphes, suceuses de miellat des pucerons. Les deux types d’insectes ont pondu quantité d’œufs qui ont donné naissance à des larves grosses dévoreuses de pucerons. Quelques chrysopes, demoiselle aux yeux d’or, ont complété le bataillon d’auxiliaires et en quinze jours, le plan d’artichaut a été débarrassé de ces nuisibles. D’une part, les auxiliaires ont fait très rapidement leur travail et d’autre part, cela montre aussi que ces nuisibles artificiellement apportés n’ont pas colonisé le reste du potager comme nous aurions pu l’imaginer…

Il existe de nombreuses variétés de pucerons parfois spécifiques à certaines plantes mais bien heureusement, les auxiliaires sont tout aussi variés pour s’en délecter ainsi que des aleurodes, des acariens, cochenilles, autres ravageurs des potagers, vergers et jardins d’ornement.

Parmi les auxiliaires, nous avons la coccinelle, bien connue de tous. Il en existe un très grand nombre de variétés, près de 6000…

  • la coccinelle à 7 points se retrouve sur les plantes basses. Elle se nourrit de pucerons ou de cochenilles en très grandes quantités. A l’automne, elle fait des réserves de pollen et de nectar pour ensuite passer l’hiver à l’abri sous des feuilles mortes, des fentes d’écorce, des tas de bois, de la mousse… Elle pond de fin avril à fin juin des œufs tout jaunes. Au bout d’une semaine, les larves vont naître et chacune mangera environ 600 pucerons. Elle passe par un stade nymphal avant de se transformer en coccinelle… jaune tout d’abord avant de devenir rouge à points noirs. Il peut y avoir une seconde génération en été qui hivernera ensuite. Elle vit en général un an voire deux.
Coccinelle Auxiliaire
Coccinelle Auxiliaire
Œufs de coccinelle
Œufs de coccinelle
Larve de coccinelle
Larve de coccinelle

 

 

 

 

 

 

 

  • la coccinelle à 2 points – rouge à point noir ou noir à point rouge. Elle se situe plutôt en hauteur sur les arbres et arbustes
  • la coccinelle à damiers jaunes et noirs que l’on rencontre plutôt sur les petits fruitiers
  • la coccinelle de 3 à 4 mm noire avec 3 petits points rouge cote à cote et qui forment comme un trait. On la rencontre sur les arbres fruitiers.
  • une autre coccinelle, Scymnus, a une larve très particulière, blanche et toute échevelée ! Elle se trouve sur les fleurs, la vigne et les arbres fruitiers.
  • la coccinelle chinoise, plus grosse que l’européenne, rouge à gros points noirs irréguliers ou l’inverse, noir à gros points rouges. Importée dans les années 1990 pour prêter main forte à la régulation des nuisibles, cette auxiliaire s’est particulièrement bien adaptée à notre climat… et même aux variétés locales qu’elle se permet de manger si elle se trouve en manque de nourriture ! Et là, on ne peut rien réguler…

coccinelle_22_points coccinelle_chinoise coccinelle_damier

 

 

 

 

 

 

syrpheAutre auxiliaire très intéressante, la syrphe, mouche aux allures de guêpe, insecte butineur et pollinisateur. Elle est jaune et noire  ; elle a 2 ailes alors que la guêpe en a 4, de petites antennes et pas de taille… de guêpe. Son vol diffère car il est très rapide et elle peut faire du sur place. Elle est inoffensive et ne pique pas. Comme dit précédemment, elle consomme le miellat des pucerons et pond de 500 à 1000 œufs. Les larves dévorent de préférence les pucerons mais à l’occasion des jeunes chenilles, des cochenilles et des aleurodes. Elle hiverne dans des tiges creuses, des cavités, des feuilles marcescentes, du lierre. Elle reprend vite son activité au tout début du printemps.

 

 

 

chrysopeverte02La chrysope verte est parfois appelée demoiselle aux yeux verts. C’est la plus commune mais il existe d’autres variétés. Elle mesure 10 à 15 mm, ses antennes sont longues et filiformes, ses ailes sont transparentes avec des nervures vertes qui rosissent à l’automne quand l’insecte recherche un abri pour hiverner. Elle se loge là où se trouveront miellat, nectar et pollen dont elle se nourrit tout en assurant la pollinisation. Les adultes déposeront leurs œufs en février/mars sur les plantes aimées des pucerons : rosiers, noisetiers, sureaux etc et les larves apparaitront avant celles des coccinelles. Il peut y avoir jusqu’à 3 à 4 générations par an. Les larves sont carnassières avec un menu très varié : pucerons, trips, araignées, rouges, cochenilles farineuses, jeunes chenilles.

 

 

 

hymenoptèreLes hyménoptères parasitoïdes sont représentés en majorité par la famille des aphidiidae, nom barbare pour parler d’un petit insecte de type guêpe. Ces insectes sont particulièrement efficaces pour décimer les pucerons mais un peu gore dans leur méthode… Ils sont filiforme et particulièrement souple : quand ils approchent un puceron, ils plient son abdomen pour lui insérer un oeuf à l’intérieur. Une petite larve va naître qui va dévorer le puceron de l’intérieur jusqu’à ce qu’il en soit momifié !

 

 

 

 

pemphredonLe pemphredon, autre petite guêpe carnassière, a d’autres méthodes d’élevage. Elle pond ses œufs dans des tiges creuses de type rosiers, onces, églantiers, sureaux ; elle y insère des pucerons pour que les larves, dès leur naissance, aient leur casse-croute à porter de dents… C’est pour cette raison qu’il est intéressant de faire de petits fagots de 20 cm de long avec un côté bouché (pour les bambous) et les répartir à travers le jardin. A laisser une année en place pour que le cycle puisse être complet.

 

 

 

 

punaise_prédatriceLes punaises prédatrices sont aussi des carnassières et ont développé une technique très particulière pour s’attaquer aux pucerons, acariens, trips et jeunes chenilles. Ils ont un rostre très développé à l’aide duquel la salive est injectée dans la proie dont l’intérieur est liquéfié et ensuite aspiré. Spécial mais efficace…

 

 

 

 

Le perce oreille ou forficule est omnivore ; il consomme nombre de pucerons de mai à août et décompose les végétaux. Certes on le retrouve dans les fruits éventrés mais il n’en est pas responsable, il profite juste de l’occasion pour diversifier son menu. En fin de saison, on peut le retrouver en bande. Il se réfugie volontiers dans des pots de fleurs retournés et bourrés de paille, bon moyen pour le jardinier de le garder à proximité des pucerons par exemple. C’est un insecte plutôt nocturne et préférant les coins humides à la sécheresse.

Les araignées sont toutes carnassières mais ne font pas toutes des toiles. Elles chassent surtout à l’affût et sont de grandes consommatrices d’insectes, volants ou non. Grâce à un venin empli de toxines, elles tétanisent et pétrifient leur proie avant de les dévorer. Toutes très voraces, elles ingurgitent environ 20 % de leur poids en nourriture chaque jour.

scarabee-carabe-calosoma-sycophantLes carabes, coléoptères en voie de disparition, sont pourtant terriblement utiles comme avaleurs de limaces et escargots ainsi que de leurs œufs.. Ils se délectent aussi des chenilles du carpocapse, des vers blancs. A l’état adulte, ils sont assez faciles à reconnaître avec leur forme allongée et leurs élytres souvent striées. Ils se reproduisent soit au printemps, soit à l’automne, suivant les espèces. Les œufs sont déposés dans la terre et la larve est aussi gourmande que l’adulte. Ils hibernent dans de vieilles souches, au sol dans les haies. Le jour ils séjournent souvent sous des pierres, à l’abri, dans les bandes enherbées, sous les haies.

 

 

 

Les millepattes sont des animaux invertébrés ; certains ne mangent que des feuilles mortes et des champignons comme les iules. Par contre d’autres sont carnivores et mangent des insectes comme les scolopendres.

La musaraigne est un mammifère insectivore contrairement à la souris qui est un rongeur ; elle est reconnaissable à son long nez pointu. Mais elle mange aussi de petits animaux comme les escargots, les chenilles, les araignées et les vers de terre. Elle doit manger toutes les 3 ou 4 heures pour mieux hydrater son petit corps. Le compost des jardins lui procure des limaces et vers de terre. Elle dévore quotidiennement l’équivalent de son poids. Elle a besoin de se cacher de ses prédateurs pour se déplacer ; un gazon de 5 à 6 cm de hauteur lui sera d’un grand secours ainsi que les feuilles mortes ou les paillis sur les parterres.

La chauve-souris que l’on aperçoit davantage les nuits d’été fait partie des auxiliaires particulièrement utiles car c’est une grande prédatrice des papillons nocturnes dont la majorité des chenilles sont particulièrement nocives pour les cultures. Elle peut aussi capturer 600 moustiques à l’heure… Elle a une chasse très efficace, mange beaucoup : elle consomme une quantité d’insectes qui peut représenter la moitié du poids du corps de l’animal.

Les oiseaux participent pleinement « au combat » contre les nuisibles du jardin. Particulièrement visibles au printemps, on peut observer les aller-retours des mésanges, merles et autres espèces, entre leur nid et la pelouse, les arbustes, le potager à la recherche de nourriture pour leurs petits. Le nombre de chenilles et autres vers coincé dans un bec de merle est impressionnant…

Nous avons aussi d’autres précieux auxiliaires comme le hérisson, les crapauds, les grenouilles, les tritons et salamandres, les couleuvres à collier, belette, renard, etc.

Ce qu’il faut retenir c’est qu’ils sont tous complémentaires car ils interviennent à des moments différents de l’année, de nuit comme de jour. Comme nous sommes acteurs de notre environnement, nous avons notre rôle à jouer pour attirer durablement ces auxiliaires. Nous devons rester vigilants et compléter leurs actions mais aussi être tolérants et bienveillants car les trois quarts des animaux ne sont ni mauvais, ni bons…

Quelques pratiques sont à éviter telle que l’excès de fertilisants riches en azote mais qui donnent des plantes en souffrance et font la joie des pucerons. D’autres à pratiquer avec parcimonie comme la pose des rubans collants pour lutter contre les fourmis et les pucerons qui envahissent les arbres fruitiers : ils sont à enlever au bout d’une dizaine de jours pour éviter qu’ils ne deviennent un piège mortel pour les auxiliaires. Pas de traitement ou de manière vraiment occasionnelle. Tout est une affaire de dosage et de tolérance en donnant le temps aux auxiliaires d’intervenir et en ne cherchant pas à avoir un jardin super propre, désherber, au carré. Un peu de flou ne nuit pas, bien au contraire…

Au potager, la priorité est d’avoir des fleurs toute l’année pour assurer le garde-manger de nos auxiliaires. Ils ont besoin très tôt, dès la fin de l’hiver, de pollen et de nectar pour se nourrir et pouvoir ensuite se reproduire. Après l’éclosion des œufs, les jeunes larves ont besoin de se nourrir aussi et de trouver à proximité des prédateurs à se mettre sous la dents. Suivant les espèces, l’étalement des naissances se fait de mars à mai/juin mais ne s’arrête pas là puisque certains peuvent avoir 3 voire 4 générations dans la même année !!! Il est donc judicieux de prévoir ce même étalement des floraisons pourvoyeuses de nourriture parmi les fruits et légumes. L’auxiliaire ne peut pas parcourir de trop longues distances entre les fleurs nourricières et les plantes pouvant accueillir leur progéniture. Prévoir aussi des fleurs automnales pour qu’il puisse faire des réserves afin de passer l’hiver sans encombre. Le lierre fait partie des meilleures plantes à remplir cette mission. Le laisser courir dans les haies, au pied des arbustes ou monter dans les arbres ne nuit pas à la santé de ces végétaux ; il ne les étouffe pas, il ne s’en nourrit pas. En revanche, il peut gêner les vivaces dans les parterres ou abimer les murs en vieilles pierres.

La pelouse regorge aussi de petites fleurettes riches en pollen et nectar telles que les violettes, les primevères, les pâquerettes, le millepertuis brunelle, le lamier pourpre, le mouron blanc… L’idéal est de garder quelques coins naturels en prairie ou par exemple des carrés de 1 m à 1,50 m de côté ou au pied des arbres fruitiers au verger. Et de manière générale, ne pas tondre trop court sa pelouse, cela permet le déplacement incognito de petits auxiliaires. L’herbe subit moins la sécheresse quand elle n’est pas coupée rase et la mousse s’installe moins. Mais même la mousse est utile ; de nombreux oiseaux l’utilisent pour faire tout ou partie de leur nid. Tout est question de tolérance et de dosage…

Le choix des arbustes pour composer les haies a son importance. Prévoir une floraison très étalée, des feuillages en partie persistants ou marcescents (les feuilles sèches ne tombent qu’au printemps, quand les nouvelles font leur apparition). Ils offrent ainsi le gîte et le couvert. Parme les espèces les plus intéressantes, nous avons le buis, le sureau noir et horticole, le laurier tin, le charme, la viorne obier ou boule de neige, le cornouiller mâle, fusain d’Europe, le nerprun alaterne.

Le gîte peut être aussi assurer en couvrant le sol de paillis et de feuilles mortes, refuges de très nombreux insectes et en même temps nourriture pour la terre. On peut faire des tas de branches et de pierres qui pourront servir de refuge à un hérisson par exemple.

On peut suspendre des petits fagots , des tiges creuses qui serviront aux chrysopes, aux hyménoptères et autres insectes. Laisser les vieilles souches se décomposer dans une haie ou sur un talus. On peut faire des abris pour perce-oreilles avec des pots retournés et remplis de paille. On peut percer des buches de trous de 2, 6 ou 8 mm pour les abeilles ou guêpes solitaires ou réunir des tiges de bambous de 10 cm de long en petit fagot. Avec ces différentes possibilités de gîte, il n’est pas utile d’avoir un hôtel à insecte acheté dans le commerce ; il est rarement utilisé par les auxiliaires car ils n’apprécient pas d’être nombreux au même endroit. Toutefois vous pouvez trouver des idées sur les site de Vivara ou de la LPO.

On peut faire des nichoirs pour les mésanges avec des trous de diamètre 28 mm pour la bleue et 32 mm pour la charbonnière.

Le rouge-gorge préfère un nichoir semi-ouvert. Pour la chauve-souris, on prévoira un trou d’accès par en-dessous.

nichoir_mésangenichoir-rouge-gorgeabri-chauve-sourisOn peut trouver des plans de nichoirs spécifiques ou multi spécifiques sur le site www.nichoirs.net

 

 

 

 

 

Il est bon de prévoir toute l’année des points d’eau pour nos auxiliaires et de changer l’eau très régulièrement. Quand on a des bassins ou des mares, il faut installer des planches, des pots ou des pierres pour permettre aux insectes de se poser ou au hérisson d’éviter la noyade. On a trouvé fréquemment des chouettes noyées dans les grands abreuvoirs dans les champs, évitons ces accidents dans nos jardins.

Et puis en hiver et seulement par temps froid, on peut mettre à disposition des oiseaux des mangeoires avec des graines de tournesol. Sinon éviter de les nourrir tout l’hiver, ils deviendront paresseux et ne chasseront plus les auxiliaires !

En résumé, si nous voulons garder nos auxiliaires dans nos jardins, nos potagers et vergers, nous devons leur offrir toute l’année le nectar et le pollen des fleurs nécessaires à leur survie, des plantes relais hébergeant les ravageurs pour nourrir leurs larves et puis des abris pour se protéger l’été et hiverner l’hiver.

 

Résumé de la conférence par JGG

2 livres de Denis PEPIN disponibles à la bibliothèque : Stop aux ravageurs dans mon jardin et Coccinelles primevères mésanges, la nature au service du jardin