Le temps des cerises

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Gwenn ha Du 1923
Gwenn ha Du 1923

Miz Mae eo ar c’haerañ
Mai est le mois le plus beau

Miz Ewen an tommañ
Juin le plus chaud

Gouere hag Eost
Ar re-se eo ar mestr.
Juillet et août
Les surpassent tous

On aimerait croire les dictons populaires mais comme la météo à la télé, il leur arrive de se tromper.
En ce début de saison estivale, le soleil continue de jouer à cache-cache avec les nuages et en dépit du réchauffement de la terre, la terre de nos jardins peine à prendre du degré.

Enfin, les fruits, eux, prennent de la couleur malgré tout. Après les fraises, ce sont les cerises. Les unes et les autres font le régal des hommes et…des merles. Après avoir célébré la fête de la musique, les oiseaux guettent les premières colorations des cerises dans les arbres pour faire leur marché à Plouégat-Guerrand et à Troguéry, car c’est là qu’on les trouve en particulier :
E Plegad hag e Trogeri A Plouégat et à Troguéry
Emañ bro ar babi. C’est le pays des cerises.

Nommé babi en Trégor, ce fruit qui s’accommode bien de notre climat porte différents noms selon les variétés et les secteurs : kerez, kignez, pabu, pabiolez, badi, cerises, merises, griottes, guignes…. On en voit de toutes les couleurs. Certaines sont rouges, d’autres sont noires, d’autres enfin sont vertes, quand elles ne sont pas mûres.

La récolte sera-t-elle bonne cette année ? Pour le savoir, il suffit d’avoir noté l’état du ciel les 23 et 25 avril car on sait que :
La pluie de la Saint-Georges
Coupe les cerises à la gorge.

Pa vez glav da c’houel Mark Quand il pleut à la Saint-Marc
E kouezh ar c’hignez er park. Les cerises tombent dans le champ.

Alors disons qu’elle sera mitigée si les merles ne sont pas trop gourmands.
Tous les ans, à Plouégat-Guerrand, se tient le pardon des cerises. Les adhérents de jardin-passion, y sont bien sûr invités.
Autrefois, à la Roche-Derrien, se tenait le marché aux badies ou merises dans la première quinzaine de juillet. Dès 2 heures 30 du matin, des femmes de la campagne portant sur leur tête des grandes mannes remplies de badies, se réunissaient, les unes sur la place, les autres en plus grand nombre, au Bas-du-Pont, et là, assises sur des escabeaux, derrière leurs mannes déposées à terre, en un vaste demi-cercle, elles attendaient la clientèle. Dès l’arrivée des premiers acheteurs, certaines se mettaient à déclamer cette litanie :
Babi, babi du Cerises, cerises noires
Kement hag un u Grosses comme un oeuf
Babi, babiolez Des cerises, des cerises
Kement hag uo polez. Grosses comme des oeufs de poulette !

Des acheteurs venaient de Lannion, de Tréguier, de Pontrieux, de Guingamp, de Paimpol et d’ailleurs.
Après avoir goûté la marchandise, ils achetaient en gros le contenu des mannes pour aller ensuite le détailler chez eux. Certains petits malins, en se faisant passer pour des commerçants, se remplissaient le ventre sans bourse délier sous prétexte de s’assurer de la qualité de la marchandise. Évidemment, les vendeuses étaient loin d’être dupes et se prêtaient de bonne grâce à ce jeu.

Voilà qui rappelle l’état d’esprit de tout bon jardinier (de jardin-passion) qui aime partager avec ses voisins, qui une salade, qui des radis, qui un bouquet de fleurs…

DG