Le mois de mai qui marquait le début de la saison claire dans le calendrier celtique divisé en deux périodes, été et hiver, an hañv hag ar goañv était autrefois l’occasion pour la jeunesse de célébrer l’éveil de la nature et de déclarer ses amours.
Comment ?
En déposant au cours de la nuit, la veille du premier mai, une branche de hêtre ou de bouleau aux feuilles naissantes à la porte de sa bonne amie. Plus la branche était grosse, plus l’amour était fort. Certains amoureux montraient leur audace en la perchant le plus haut possible. Ainsi le rameau trônait au sommet d’une grange ou d’une cheminée, face à l’entrée de la maison de façon à être vu dès l’ouverture de la porte. On imagine l’équipée nocturne des galants, les escalades, les mouvements d’échelles ponctués de concerts de chiens..
Le vert tendre des feuillages confirmait des liens d’amitié déjà ébauchés en d’autres circonstances et présageait même un mariage dans l’année. Mais la tradition n’était pas toujours aussi empreinte de poésie. Comme dans un miroir à deux faces, le reflet d’amour devenait parfois image de vindicte : la branche honorable s’effaçait alors pour céder la place à un bouquet moins tendre, chargé de symboles cruels.
On réservait les épines, le houx, les orties, les ronces, les chardons, les choux en fleur ou montés en graines, aux acariâtres, aux méchantes, aux jalouses – fleurs de choux / fleurs de jaloux – aux grincheuses et aux avaricieuses.
Le genêt sec était pour les souillons, les malpropres ; le laurier pour les paresseuses ; le sureau pour les incontinentes ou celles à l’haleine fétide ; les branches de pommier fleuri pour celles qui avaient un penchant pour la dive bouteille, le sapin, le pin pour les filles de mauvaise vie. Brocard ultime, le symbole de verdure faisait place à, un nid de pie avec des oeufs pourris, ou encore le délivre d’une vache,
L’injure pouvait être le fait d’un soupirant éconduit, déçu ou trompé. Pour une danse ou un tour de pardon refusés, par exemple, le « mai » fournissait l’occasion de se venger. Aussi l’inquiétude était-elle grande dans les chaumières, la nuit du 30 avril. Bodig mae ac’h a an dro / daoust da biv a zigoueo ?, la tournée de mai est en marche, qui aura son mai ? La question était bien là ! Allait-on seulement en avoir un et quelle en serait la nature ?
Afin d’éviter les commérages et les affronts, certaines mères de famille qui avaient remarqué de petites brouilles entre leurs filles et leurs prétendants se levaient avant l’aube pour éventuellement éliminer le mai injurieux ou en mettre un elles-mêmes. L’absence de bouquet était très mal supportée par des filles dans la fleur de l’âge.
Au matin du premier mai, commentaires et supputations allaient bon train dans les villages où s’échangeaient compliments ou remarques narquoises.
Les garçons ne pouvaient tenir leur langue et l’un ou l’autre vendait la mèche : pig pe vran a gan, une pie ou un corbeau finit toujours bien par chanter. Dans tous les cas, la coutume du bodig mae, petit rameau de mai, laissait des traces profondes dans les coeurs. C’était il y a une soixantaine d’années à la campagne ….
DG